i don't feel right when you're gone
catch me if I fall, kiss me if I cry, love me if I doubt
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Siobhan était excitée comme une puce. Elle avait du mal à se reconnaître, mais tant pis. Depuis qu'elle avait retrouvé Maithias la veille, plus rien n'allait bien dans sa petite tête. Elle se demandait où était passée la Siobhan cynique et sarcastique qu'elle était encore la veille au matin. Même ses élèves avaient été déboussolés par son changement d'attitude. Il était rare de voir leur institutrice en train de rêvasser en regardant par une des hautes fenêtres de la salle de classe... Mais elle était très agréable, du coup. Il fallait dire que retrouver son amour d'enfance l'avait quelque peu chamboulée et, surtout, avait totalement sorti Liam de son cerveau. Du moins, pour le moment. Mais il n'était pas question qu'elle perdît Maithias. Pas encore une fois.

Mais passons, ne pensons pas à de telles choses alors qu'ils venaient à peine de se retrouver. La jeune institutrice se hâta bizarrement de rentrer chez elle après les cours, ou peut-être était-ce parce qu'ils avaient convenu d'un rendez-vous chez elle avec Maithias. A vingt heures précises. Il était prévu qu'il passât la soirée chez la jeune femme... Celle-ci était impatiente de le retrouver et, surtout, de voir comment les choses allaient évoluer entre eux. Elle ne tarda donc pas à pousser la porte de sa petite maison, balançant sa sacoche dans son bureau avant de directement s'atteler à tout préparer pour leur soirée en amoureux. Amoureux... Elle avait du mal à réaliser ce qui se passait entre eux depuis la veille. Un petit soupir lui échappa, suivi d'un sourire particulièrement niais.

Siobhan appela donc le traiteur – elle ne faisait pas particulièrement confiance à ses talents de cuisinière et, surtout, elle voulait que tout soit parfait pour cette soirée – puis entreprit finalement de faire sa couleur blonde en attendant la livraison. Elle avait tenté le blond dans sa jeunesse, vers l'âge de seize ans, et elle s'était toujours souvenue du regard plus qu'appréciateur de Maithias quand il l'avait découverte avec cette couleur de cheveux. Il fallait avouer que le blond lui allait plutôt bien... Enfin, la livraison eut lieu et la jeune femme put donc aller se changer après avoir pris une douche et rincé ses cheveux désormais d'un beau blond doré. En simple sous-vêtements, elle se planta devant son armoire, cherchant quelque chose d'un peu habillé. Un nouveau soupir passa ses lèvres, cette fois de dépit, alors qu'elle considérait la montagne de vêtements présents dans son armoire. Restait à trouver ses robes de... disons, soirée.

Ce ne fut qu'au bout de dix bonnes minutes de recherches intensives qu'elle remit la main sur sa robe noire piquetée de petites perles argentées qu'elle avait achetée pour le mariage d'une de ses amies. Une robe en satin, à bretelles fines, qui s'arrêtait à mi cuisses et dont le décolleté astucieux laissait parfaitement deviner ce qu'elle cachait. Bref, parfaite. Siobhan se hâta de s'habiller en se rendant compte qu'il ne lui restait plus que quinze minutes pour se maquiller et se coiffer. Elle se chaussa rapidement d'une paire de talons aiguille noirs, fila dans sa salle de bains pour lisser ses mèches blondes et maquiller ses yeux de noir. Sans se vanter, elle était tout simplement magnifique. Elle s'admira un instant dans la glace avant de sursauter violemment en entendant la sonnette retentir dans toute sa maison. C'était forcément Maithias... La jeune femme dévala les escaliers, poussa un juron quand elle faillit tomber à cause de ses talons, envoya rapidement ces derniers se balader du côté du placard à chaussures avant de finalement ouvrir à son amant, tout en replaçant une de ses mèches blondes en place, les joues légèrement roses.

« Bonsoir... »

24 heures entières avaient passées, c’était tout. Et pourtant, elles lui avaient semblées interminables. Il n’avait pensé qu’à elle, n’avait dormi que pour être plus présentable, ne s’était réveillé que pour aller la voir, n’avait mangé que pour reprendre des couleurs. Depuis qu’il avait retrouvé Siobhan la veille, sa vie reprenait un certain sens. De nouveaux, ses pas semblaient affirmés, ses sourires francs, et son visage était un peu moins marqué. Il allait enfin de l’avant. Au-delà de cette illusion de mouvement et d’action dans cette guerre de clans, il s’était trouvé un amour. Un amour qu’il n’aurait jamais du perdre. Il mesurait pleinement la chance qu’il avait de l’avoir revue, et que ses sentiments pour lui soient intacts.

Ils s’étaient donné rendez-vous chez elle, puisque la fierté de Maithias n’avait pas accepté de l’accueillir chez lui. Qu’aurait-elle pensé en entrant dans l’appartement qui ne disposait que du minimum ? Il se refusait à admettre qu’elle disposait de plus de moyen que lui. Son amour propre en aurait pris un trop grand coup. Après avoir tenté toute la journée de s’occuper véritablement pour penser à autre chose – mais sans succès-, l’heure était venue de s’habiller. Où plutôt, l’heure était venue de s’agacer face à ses manques cruels d’argent.

Vivre dans la misère était le quotidien de Maithias, et l’infortune était l’un de ses grands malheurs. Mais il avait quitté ses études à 19 ans, à la mort de ses parents, pour s’occuper de sa jeune sœur. S’il avait su que ça ne mènerait à rien, et que sa sœur le quitterait dès que possible, peut-être son avenir aurait-il été différent. Mais peu importait. Désormais, il avait Siobhan, sa princesse, et finalement, peut-être était-ce le destin qui avait voulu que leurs chemins se croisent à nouveau ? Maithias secoua la tête ; il délirait. Depuis quand croyait-il à toutes ces fadaises ? Il ferma les yeux quelques instants. A croire que sa toute nouvelle relation avec Si’ le mettait sens dessus dessous…

Bref, il sortit un pull à Col en V noir et un T-shirt blanc de son armoire, agrémentant le tout pantalon en tissu noir. Une pause salle de bains pour se parfumer et repeigner un coup ses cheveux, il avait déjà plus fière allure. Jetant un regard furtif à la pendule suspendue dans le salon, il constata que l’heure tournait lentement, mais sûrement. Bientôt, il quitterait son logis pour rejoindre la femme de son cœur. Siobhan… Elle était tellement jolie… Il sourit inconsciemment, repensant à leur après-midi de la vieille. Une après-midi pour le moins mouvementée …

Maithias quitta enfin son habitat, le pas léger, chantonnant doucement dans l’air frais du soir. Il pressa le pas, impatient de la retrouver, de la revoir, de la caresser à nouveau. Lorsqu’il arriva devant la maison de Siobhan, il se planta devant la porte en traversant l’avant-jardin. Il souleva son bras lentement, et détendit son doigt pour l’appuyer sur la sonnette. Les secondes parurent longues, secondes pendant lesquelles il revit mentalement son doux visage…

Elle ouvra enfin la porte, vêtue de ses plus beaux habits et prononça un simple bonjour. Il ne lui laissa pas le temps de poursuivre. Posant ses mains sur sa taille et la poussant à l’intérieur, il l’embrassa fougueusement, refermant la porte derrière lui. Interrompant brusquement le contact, il plongea son regard dans le sien pour lui répondre :

« Si’, je t’aime… »

Vingt-quatre heures. Elles avaient également paru terriblement longues à Siobhan, même si ses élèves avaient contribué à faire passer le temps, notamment grâce aux questions qu'ils lui posaient sans cesse. Elle avait eu la chance de tomber sur une bonne classe, curieuse et intéressée, les heures de cours étaient donc toujours très intéressants puisque ses élèves cherchaient toujours à tout comprendre. Mais aujourd'hui, rien d'autre que Maithias n'avait compté. Tellement que plusieurs de ses élèves lui avaient demandé si elle n'était pas malade. Sa relation toute neuve avec Maithias la chamboulait bien plus que celle qu'elle avait eue avec Liam. Sinon, elle ne se serait pas autant mise sur son trente-et-un, même pas avec Liam, elle n'aurait jamais essayé de se mettre autant en valeur. Mais c'était différent, Maithias était son premier amour, l'homme qu'elle avait aimé depuis son enfance, depuis qu'Edwin l'avait ramené chez eux pour la première fois en fait.

Mais elle ne devait pas se laisser égarer dans son labyrinthe de pensées. Elle eut juste le temps de mettre une dernière touche à son maquillage, par du rouge à lèvres d'un carmin intense, avant que la sonnette ne retentît. Elle se hâta d'aller ouvrir, balançant dans le même temps ses talons aiguille qui avaient manqué de lui éclater une cheville dans les escaliers. Et la simple vue de Maithias fit s'emballer son souffle déjà court, tandis qu'elle le saluait doucement. Elle eut juste le temps de reprendre son souffle que déjà son amant s'emparait de ses lèvres pour un baiser incroyablement fougueux. Un frisson traversa son échine quand elle sentit ses mains se glisser sur sa taille, un sourire étira ses lèvres rouges. « Si’, je t’aime… » Elle plongea son regard bleu dans celui, brun, de son amant, caressant ses lèvres sur lesquelles son rouge à lèvres s'était déposé.

« Moi aussi je t'aime Mait'... Tellement, tellement... Mon Prince Maithias à moi... »

Elle se mordit la lèvre, ses mains passant sur son torse couvert de ce pull noir qui le moulait divinement bien. Elle sentit une brutale envie de lui arracher ces vêtements pour qu'ils fassent furieusement l'amour dans toutes les pièces de sa maison, mais elle préféra secouer la tête et attraper sa main, l'entraînant à sa suite jusqu'au salon. Là, elle l'obligea presque à s'asseoir sur le divan, s'installa ensuite à califourchon sur ses cuisses, obligeant de ce fait sa robe à remonter le long de sa propre peau.

« Je suis contente que tu sois là... Je n'ai pas cessé de penser à toi aujourd'hui. J'ai même rêvé de toi cette nuit, tu m'obsèdes totalement... »

Elle se mordilla la lèvre avant de se lover contre lui et frotter son nez au creux de son cou, inspirant longuement son parfum. Il lui avait terriblement manqué durant ces vingt-quatre petites heures, tellement qu'elle ne pouvait s'empêcher de le toucher pour s'assurer qu'il était bien là.

« Tu restes à la maison cette nuit, hein ? »

La porte de la maison s’entrebâilla doucement, et elle lui apparut comme un ange. Enfin, un ange diaboliquement sexy : elle portait une robe décolletée noire ornée de perles argentées qui agrémentait son physique de manière admirable, si bien que Maithias n’avait su résister à se jeter sur elle en la voyant. De plus, elle avait teinté ses cheveux en blonds, se souvenant de l’époque où il avait apprécié cette couleur sur elle. Il la trouvait vraiment harmonieuse ainsi. Comme au bon vieux temps. Il ne lui laissa le temps de souffler, l’embrassant comme un sauvageon. Lorsqu’il rompit leur contact pour lui déclarer à nouveau son amour pour elle, elle planta son regard bleuté dans le sien, manquant de le faire vaciller ; il pouvait sentir ses doigts sur ses lèvres, rouges du maquillage à Siobhan, qu’elle effaçait de manière attendrissante.

« Moi aussi je t'aime Mait'... Tellement, tellement... Mon Prince Maithias à moi... »

Alors qu’elle se mordait la lèvre inférieure, il sourit. Prince des Fauchés, oui. Mais elle ne le savait encore. Ses mains délicatement féminines caressaient désormais son torse, et il frissonna légèrement à ce contact minime. Quelle femme était-elle pour le stimuler au moindre toucher ? Il n’eut le temps de s’interroger sur l’emprise qu’elle avait sur lui, car elle prit sa main et l’entraîna à sa suite. Le vestibule défila en un éclair devant Maithias, tiré fermement par une femme décidée ; Siobhan. Il atterrit littéralement sur le divan en cuir du salon, accompagné de sa chère et tendre qui se posa sur lui, faisant remonter sa robe de quelques centimètres … Il préféra tourner le regard. Ne pas céder était la clé, pas tout de suite. Si elle savait qu’il céderait au moindre de ses gestes, alors, il était foutu. Manipulable à souhait. En clair, une proie facile. Et il ne voulait pas. Il avait trop peur qu’elle l’abandonne, trop peur qu’elle retourne vers ce Liam.

« Je suis contente que tu sois là... Je n'ai pas cessé de penser à toi aujourd'hui. J'ai même rêvé de toi cette nuit, tu m'obsèdes totalement... »

Il sourit à nouveau et la serra tendrement contre lui, elle semblait si fragile. Son nez aquilin se posa sur son cou, et il baissa la tête pour l’appuyer contre la sienne. Il chercha à nouveau ses douces lèvres, et la renversa sur le divan, pour se retrouver au dessus d’elle. Il lui décocha un sourire enjoué et l’embrassa sur la joue, comme on câline une gamine. Pour lui, elle était restée la Siobhan de 8 ans, celle qui souriait timidement aux inconnus. Les yeux de son amante pétillaient de bonheur. Ses lèvres s’ouvrirent lentement, et elle laissa échapper une question, comme légèrement inquiète :

« Tu restes à la maison cette nuit, hein ? »
« Je resterais pour toi toute une vie s’il le fallait… »

Il la rassura d’emblée. Il s’était promis de ne plus la quitter, de la serrer dans ses bras quoi qu’il advienne. A partir de maintenant, ils étaient ensemble pour le meilleur et pour le pire.

Siobhan avait vraiment du mal à se contrôler. La simple présence de Maithias à ses côtés la faisait réagir de manière exacerbée, elle devait l'avouer, mais comment pouvait-elle s'en empêcher ? Ils ne s'étaient pas vus depuis près de dix ans, ils s'étaient retrouvés seulement la veille au soir, et désormais, ils ne formaient pas qu'un simple duo d'amants, dont l'un apprenait à l'autre tout ce qu'elle devait savoir... Ils étaient bien plus que ça. La jeune femme se prêtait à croire à l'existence des âmes soeurs, parfois. Mais d'un certain côté, il lui arrivait d'avoir des accès de panique soudaine. Et si Maithias reprenait ses vieilles habitudes ? Arriver, s'envoyer en l'air avec elle et repartir presque tout de suite après ? Sa gorge se serra à cette idée, et elle se hâta d'embarquer son amant jusqu'au salon pour pouvoir se blottir contre lui à sa guise. Il ne faisait que sourire à ses paroles. Elle savait qu'il n'était pas d'un naturel bavard, plutôt à s'exprimer par les gestes et le regard... Mais elle commençait quand même à s'inquiéter...

Peut-être qu'il sentit cette inquiétude, puisqu'il passa au-dessus d'elle, tout en la serrant contre lui. Avec un petit soupir ravi, la jeune femme s'abandonna totalement à cette étreinte, les bras fermement noués autour du torse de son amant. Elle l'aimait. Bon sang qu'elle l'aimait... Rien que le fait que son coeur battît comme si elle courait un trois cent mètres en sprint le prouvait. Il battait tellement vite, d'ailleurs, qu'elle se retrouva bien vite à court d'oxygène et se vit obligée de se séparer des lèvres si douces de Maithias. Celui-ci n'en sembla pas du tout gêné puisqu'il vint l'embrasser sur la joue. Comme quand elle était encore enfant. Il fallait avouer que leurs débuts avaient été assez compliqués, puisque Siobhan était du genre timide et mal à l'aise avec les inconnus. Edwin avait presque dû la tirer par le bras pour qu'elle osât enfin s'approcher de Maithias... Que de souvenirs, dont elle dut pourtant se tirer pour demander à son amant s'il restait bien dormir chez elle, cette nuit.

« Je resterais pour toi toute une vie s’il le fallait… »
« Tant mieux alors... Je ne compte pas te laisser filer... »

La jeune femme sourit doucement, franchement rassurée, en se blottissant de nouveau contre lui, un peu plus fort peut-être. Elle avait besoin de le sentir contre elle, plus que jamais. Elle avait vraiment souffert de sa séparation avec Liam, suite à laquelle elle était devenue la Siobhan cynique et lunatique qu'elle était d'habitude. Maithias semblait la faire revivre après un long sommeil forcé, comme si elle avait été plongée dans le coma... Elle frissonna à cette simple pensée, s'accrocha un peu plus fort à son amant tout en balayant furieusement le visage de Liam de ses pensées. Elle ne devait pas penser à lui, pas alors qu'elle était dans les bras de Maithias. Elle ne tarda d'ailleurs pas à relever le visage vers lui, caressant doucement sa joue, un petit sourire passant ses lèvres.

« Tu veux boire quelque chose ? J'ai... jus de fruits, champagne, Jack Daniel's, Eristoff, Martini, du cidre aussi... C'est comme tu veux. »

Elle avait du vin aussi, mais elle réservait la bouteille pour le dîner qu'elle avait prévu dans la salle à manger attenante à la cuisine. Salle à manger qu'elle avait d'ailleurs préparée avec un soin tout particulier. Chandelles, fleurs, argenterie, bref elle avait vraiment joué le grand jeu. Comment lui en vouloir ?

Les deux amants se connaissaient depuis tant d’années que Maithias ne pouvait parler de sa vie sans l’évoquer. Aujourd’hui plus que jamais. Il pouvait discerner le moindre de ses sentiments à travers ses gestes, ses expressions et son regard, et il ressentit soudain son appréhension. Il était entré comme il l’avait toujours fait, la prenant dans ses bras pour l’embrasser dans le but de la mener au septième ciel, la quittant dès l’acte amoureux accompli. Dans sa jeunesse, il avait manqué de constance et de maturité, blessant sans le savoir Siobhan, repartant comme il était venu, et il comprenait qu’aujourd’hui elle craigne qu’il agisse de la même façon. Mais lui savait qu’il ne serait plus jamais comme ça. Et c’est pourquoi il l’avait embrassée sans retenue, pour effacer tous les doutes que son cœur pouvait nourrir face à lui, homme indigne d’un tel amour.

Maithias s’était promis, durant ses heures de grandes réflexions, de tout faire pour que sa bien-aimée remplace l’ancien Maithias par le nouveau. Un Maithias certainement plus affectif, plus protecteur, plus … présent. Il ne voulait plus qu’elle souffre, qu’elle s’inquiète de ses sentiments pour elle. Il souhaitait simplement qu’elle soit heureuse auprès de lui, et qu’il ait pu lui offrir ce dont elle avait besoin. Son égocentrisme envahissant avait laissé place à cette affection infaillible qu’on nommait amour, et en ce moment, il aurait totalement changé pour lui plaire, pour ne pas la perdre.

Plongeant son regard dans le sien encore une fois, il contemplait les yeux azur qu’il voulait inscrire à tous jamais en lui. Elle possédait un regard envoûtant, proche de l’hypnose, d’une couleur qui le sidérait à chaque fois. Il se perdait dans ses prunelles myosotis, ne pouvant s’en détacher sans un effort suprême.

« Tant mieux alors... Je ne compte pas te laisser filer... »

Cette réponse le tira de sa rêverie divine, et le ravit profondément. Il priait pour qu’elle l’aime autant que lui. Oui, indéniablement, il était fou de la fausse blonde qui reposait recroquevillée entre ses deux bras ; fou à lier. Elle lui souriait amoureusement, blottie contre lui. Comment ne pas fondre pour une telle femme ? Ah, vraiment, la gente féminine ne cessait de retourner le cœur de Maithias par ses talents, ses atouts, ses airs de majesté. Un Roi sans Reine ne pouvait se voir attribuer le nom de Roi, et Maithias n’aurait pu vivre correctement sans elle. Les sept dernières années en avaient été la preuve formelle.

Alors qu’ils étaient l’un contre l’autre depuis un moment, il sentit Siobhan se crisper et s’accrocher à lui. Quelles pensées pouvaient bien traverser son esprit ? Il décida de se taire, puisque seul être auprès d’elle lui importait. Elle caressait sa joue si délicatement qu’il frissonnait, si bien qu’il aurait pu lui arracher sa robe à tout moment. Ne pas oublier sa promesse…

« Tu veux boire quelque chose ? J'ai... jus de fruits, champagne, Jack Daniel's, Eristoff, Martini, du cidre aussi... C'est comme tu veux. »

Il fronça les sourcils… Le retour de son amour propre. Quand elle viendrait chez lui, il n’aurait guère autant de choix …

« Je prendrais ce que tu prends. »

Il avait préféré répondre ainsi, peut-être par galanterie. Qui sait. Avant qu’elle ne parte pour leur chercher à boire, il déposa un baiser sur ses lèvres, comme pour la retenir. Au diable l’alcool, il ne voulait qu’elle ce soir…

Il l'avait blessée, oui, à ne passer qu'en coup de vent, simplement pour visiter son lit et ensuite disparaître comme une ombre. Elle avait très mal vécu cette période à cause du comportement de Maithias, mais elle avait toujours fait en sorte de ne jamais le montrer. Son père lui avait toujours dit de ne jamais dévoiler les failles qui pouvaient être en elle, ne jamais montrer ses faiblesses. Elle ne les avait jamais montrées. Mais désormais, tout était différent ; elle aimait Maithias, il l'aimait, elle pouvait bien se laisser aller au doute de temps en temps. Enfin, le doute... L'inquiétude serait le mot le plus juste pour qualifier la peur qui lui étreignait le coeur pour le moment. Mais son amant sembla deviner son inquiétude puisqu'un simple baiser suffit à la réconforter.

Siobhan ne voulait pas souffrir d'une nouvelle relation. Elle avait suffisamment donné avec Liam. Son ancien petit-ami s'était montré d'un égoïsme terrible en souhaitant la garder avec lui à Cork, un tel égoïsme qu'elle était partie comme une vraie voleuse, sans rien lui dire. Leur relation avait pris un terme douloureux, même encore aujourd'hui pour la jeune femme. Néanmoins, elle savait que désormais Maithias était là, et qu'il saurait lui faire oublier toutes ses douleurs passées. Elle savait parfaitement qu'il ferait tout pour la rendre heureuse. Elle le connaissait parfaitement, mais elle savait aussi qu'il avait changé depuis ces sept ans de séparation... Qu'avait-il bien pu se passer entre temps ? L'heure n'était toutefois pas à la curiosité mais bien à leurs retrouvailles.

Maithias semblait totalement perdu dans la contemplation de ses yeux. Elle sourit, reconnaissant bien là son amant. Depuis qu'elle était petite, il avait toujours été fasciné par ses yeux, elle s'était toujours demandé pourquoi. Ce n'étaient que des yeux bleus, certes d'un bleu azur qui tirait fortement sur le myosotis et lui offraient ainsi un pouvoir de séduction énorme, mais elle n'avait jamais vraiment cherché à en jouer. Ce n'étaient que des yeux. Enfin, elle ne tarda pas à tirer Maithias grâce à sa réponse qui sembla le ravir. Il suffisait de voir son sourire... Son simple sourire qui donnait envie à Siobhan de se blottir contre son torse et ne plus jamais en bouger. Juste l'un contre l'autre jusqu'à la fin des temps...

Les doigts de la jeune institutrice finirent par s'égarer sur la joue de Maithias, la caressant doucement. Ce simple geste fit naître des frissons sur la peau de son amant, frissons qui ravirent d'ailleurs la demoiselle. Un sourire étira ses lèvres. Il était tout aussi réceptif à ses gestes qu'elle aux siens... Il était parfois effrayant de voir à quel point leurs corps s'attiraient immanquablement, comme deux aimants d'une puissance incroyable. Finalement, elle lui proposa à boire, faisant l'inventaire de ce qu'elle avait dans son frigo et ses placards. « Je prendrais ce que tu prends. » Elle hocha doucement la tête, fermant finalement les yeux au baiser qu'il lui offrit. Il semblait ne pas vouloir la laisser partir, pourtant ce n'était pas comme si elle allait faire un séjour en Thaïlande... Siobhan serra doucement ses doigts avant de disparaître dans la cuisine pour aller chercher à boire. Mais surtout pour se calmer.

Son coeur battait à grands coups dans sa poitrine, de grands coups douloureux mais terriblement bons. Elle savait toutefois qu'elle devait se ménager, sa maladie cardiaque n'était pas à prendre à la légère. La jeune femme inspira à fond, sortit ensuite deux flûtes et la bouteille de champagne qui attendait dans le frigidaire. Une hésitation, et finalement elle troqua le champagne et les flûtes pour le jus de fruits qu'elle avait cité. Si elle voulait prendre son traitement pour calmer son coeur, elle ne devait pas boire d'alcool pour le moment. Avec un petit soupir, elle revint dans le salon, deux verres pleins en main.

« J'aurais bien fait péter le champagne mais mon coeur fait des siennes... »

Elle grimaça, quelque peu mécontente de mettre ce sujet sensible sur le tapis, avant de venir s'asseoir à côté de Maithias pour se blottir contre son flanc comme une petite fille. Une petite boite de cachets était serrée au creux de sa paume.

La vie n’était que déceptions et coups durs, si bien qu’amour et échec étaient indissociables. C’était tout ce filet de désillusions s’abattant sur vous tout du long, qui contribuait à vous forger un caractère, une identité. C’est pourquoi ils avaient changés, elle autant que lui. Ils n’étaient plus ces gosses insouciants qui s’embrassaient sans porter leur regard sur le lendemain, ils n’étaient plus ses adolescents qui s’envoyaient en l’air sans craindre que leur amour ne se brise le lendemain. Ils étaient tout simplement devenus adultes, et leur maturité avait évolué avec eux.

Qui aurait pu en vouloir à une femme blessée par les deux seules relations amoureuses qu’elle avait vécue ? Lui moins que personne d’autre, puisqu’il était le premier fautif. Il savait trop bien quelle affreuse douleur vous tiraillait la poitrine quand un être en qui vous aviez placé vos espoirs vous quittait, sans remords apparents. Il se souvenait trop bien d’Alyson … Bref. Maithias aurait voulu effacer toutes les douleurs, les craintes, les peurs de Siobhan, mais ce serait un dur combat pour extraire toutes les méfiances de son cœur.

Le beau brun réfléchissait tandis que son amante disparaissait dans sa cuisine. Il se demandait quand annoncer à sa Belle qu’il avait tout perdu ; sa famille, ses amis, son argent. Les romantiques se complaisaient à penser que le vrai amour n’était pas superficiel, mais il relevait presque du mythe que de croire qu’un homme au bout du rouleau pouvait plaire à une divine princesse. Il soupira… Si seulement tout aurait pu être plus simple…
Siobhan se faisait longue. Que pouvait-elle bien fabriquer dans sa cuisine ? Mystère inéluctable d’une femme secrète. Lorsqu’elle revint, la mine un peu moins gaie, un air interrogateur se peignit sur le visage marqué de Maithias :

« J'aurais bien fait péter le champagne mais mon cœur fait des siennes... »

Son cœur eut un raté. Comment sa, son cœur faisait des siennes ? Ses yeux grands ouverts, il s’inquiétait terriblement pour elle. Ses yeux demandait plus d’explications, qu’il émit finalement à voix haute, obligeant Si’ à lui répondre franchement. Avant qu’elle ne lui répondre, il prit les deux verres de ses mains et les posa sur la table basse devant le divan. Se mordillant la lèvre en observant son amour, il attendit qu’elle s’asseye auprès de lui pour la prendre légèrement dans ses bras. Elle lui semblait plus fragile que jamais. Il voulait qu’elle aille bien, il voulait calmer les battements affolés dans sa poitrine. Il caressa ses cheveux, son visage, délicatement, la bouche tirée en coin. Elle pouvait désormais lui révéler ses problèmes de santé ; tandis que lui, fatalement, devrait garder ses soucis pour plus tard, s’il ne voulait éviter la catastrophe.

Oui, effectivement, la vie n’était jamais rose, et les détours incongrus vous tombait toujours dessus, quand vous aviez le dos tourné et que vous vous croyiez heureux …

Alors que l’anxiété de Maithias était à son paroxysme, et que Siobhan se logeait dans ses bras, cette dernière inspira profondément pour lui répondre. Il subodorait que ce ne devait pas être une déclaration facile, aussi la laissa-t-il respirer. Et puis, il n’était pas pressé …

« Je suis née avec une insuffisance cardiaque, c'est pour ça que je n'ai jamais vraiment pu faire de sport. Tu te souviens, quand j'étais petite ? Tu m'avais demandé de venir avec Edwin et toi à la piscine, mais mon frère t'avait dit quelque chose comme quoi mon père avait besoin de moi et que je pouvais pas venir ? »

Il lui fit un petit sourire triste, accablé par cet aveu, bien qu’il pense qu’elle en avait déjà vu d’autres, et qu’à force, la compassion des gens devaient la mettre en rogne. Oui, l’excuse de la piscine lui revenait en mémoire. Cela lui avait toujours paru un peu louche qu’un père demande sa fille de 9 ans pour de l’aide, alors qu’il disposait d’un grand gaillard de 16 ans. Il hocha la tête, acquiescement à la remémoration de Siobhan qui illustrait ses propos. Ainsi, elle vivait depuis toujours avec cet insuffisance, et il n’avait rien su déceler …

Soudain, il eut comme un choc. Tant de nuits passées à faire l’amour avec elle, affolant son cœur presque chaque jour… Sans le savoir, il avait été fautif et inconscient du danger que représentaient leurs chevauchées. Siobhan serrée contre lui, il délaissa momentanément leur étreinte pour mesurer pleinement quel aveugle il avait été, quel risque ils avaient encourus … BON SANG ! Pourquoi l’avait-elle laissé faire ?! La culpabilité commençait à le ronger. Il releva son regard et la vit avaler ses médicaments avec du jus d’orange. Son regard ne lui semblait soudain plus si brillant. Si’ se blottit à nouveau contre lui, passa ses bras autour de sa taille et laissa glisser ses doigts sur son dos froid, et se remit à califourchon sur ses jambes. Il la regarda fixement, tentant de comprendre le pourquoi. Il n’en revenait toujours pas, vraiment.

« Mais pensons à autre chose, plutôt. On est rien que tous les deux... Alors ne remettons plus ce sujet sur le tapis, j'aime pas trop en parler. »

Il la regardait toujours, et esquissa soudain un sourire. Soit. Il comprenait que son amante n’ait besoin de la pitié d’autrui, et ferait comme si elle était en pleine santé. Mais il savait, qu’inconsciemment, il ne la verrait plus jamais du même œil. Il tenta de penser à autre chose, et il recala le sujet au fond de son esprit lorsque les lèvres de Siobhan vinrent l’embrasser fougueusement. Il se promit de ne plus aborder ce sujet avec elle, à moins qu’elle n’y vienne par elle-même. Elle touchait à nouveau sa joue, revenant à leurs gestes habituels, comme si rien n’avait changé.

« Hm... Je t'aime Maithias, tu le sais ça ? »

Il sourit et hocha la tête.

« Je t’aime aussi Siobhan … »

Il l’embrassa longuement et la souleva délicatement avec lui, se levant sous une impulsion.
Accrochée à ses bras, il les fit avancer de quelques mètres pour la plaquer contre un mur et l’embrasser plus vigoureusement encore. Elle désirait qu’il oublie son insuffisance cardiaque, elle serait servie …

Siobhan sentit son amant se crisper soudainement contre elle. Ses sourcils se froncèrent alors qu'elle relevait le visage vers lui d'un air quelque peu curieux, mais surtout inquiet. Il avait l'air perdu dans ses pensées, des pensées bien peu réjouissantes d'après ce qu'elle pouvait voir sur son visage. Elle se doutait bien des réactions qu'avaient pu provoquer son aveu dans l'esprit de Maithias, notamment au sujet de leurs nuits passées ensemble durant toutes ces années, qui auraient parfaitement pu la faire succomber à une crise cardiaque. Elle prit le temps d'avaler ses médicaments, sentant très vite la douleur s'atténuer dans sa poitrine, puis vint se réinstaller à califourchon sur les cuisses de son amant tout en appuyant son front contre le sien. Il avait l'air totalement perdu, presque halluciné, si bien qu'elle lui intima de ne plus penser à cela, se hâtant même de l'embrasser avec fougue pour lui sortir ces pensées de la tête. Tout en caressant sa joue, elle lui souffla qu'elle l'aimait. Oh oui elle l'aimait. Jusqu'à la mort, sans doute, elle l'aimait... Te quiero, jusqu'à la mort.

« Je t’aime aussi Siobhan … » Ces simples paroles réussirent à faire rosir la jeune institutrice, qui cacha son visage au creux du cou de son amant. Liam avait toujours été assez avare de mots doux. Elle n'en avait pas spécialement l'habitude... Ses souvenirs lui échappèrent brutalement quand elle sentit Maithias la soulever, puis la plaquer contre le mur le plus proche. Elle se retrouva donc obligée d'enrouler ses jambes autour de son bassin et ses bras autour de son cou pour éviter de tomber. Très vite, les lèvres de Maithias retrouvèrent les siennes pour un baiser si vigoureux qu'elle sentit de longs frissons traverser son dos. Et pas de froid. Il avait intérêt à se calmer s'il ne voulait pas qu'elle lui saute dessus pour arracher ses vêtements... Quoique, ça pourrait être une bonne option, non ? Allons Si', calme-toi un peu...

Siobhan finit par se reculer pour récupérer un peu d'air, le coeur battant à tout rompre dans sa poitrine. Elle garda un moment les yeux fermés, le temps de reprendre un rythme respiratoire normal, avant de finalement rouvrir les paupières pour pouvoir admirer le visage de son amant. Elle avait comme l'impression que leur dîner allait attendre. Il suffisait de voir leurs yeux brillants à chacun... L'une des mains fines de la blondinette se faufila le long du torse de Maithias, avant de finalement se glisser sous les couches de tissu et remonter lentement, à même cette peau douce et chaude qui l'attirait irrésistiblement. Elle n'avait plus les idées très claires notre Siobhan, apparemment. Elle s'était pourtant promis de ne rien faire de trop déplacé, juste une petite soirée en amoureux tout ce qu'il y a de plus douce... Elle secoua brutalement la tête, faisant ainsi voler ses mèches blondes autour de son visage, tandis que ses joues prenaient un magnifique teint rose fuchsia. Franchement gênée, elle retira sa main, laissant ainsi le pull retomber correctement sur le torse de Maithias, puis se cacha le visage contre son épaule. Bon sang, elle n'arrivait vraiment pas à se contrôler...

« Excuse-moi... Pulsions, je... j'ai du mal à me contrôler avec toi... je crois que tu m'attires un peu trop... »

Elle lui adressa un petit sourire gêné, les joues toujours aussi roses. Bien joué Si', t'es vraiment la meilleure pour te mettre dans de telles situations.

« Toute belle femme s'étant jamais une
fois essayée au jeu de l'amour ne le désapprend jamais. »

Et c’était bien vrai. Les femmes possédaient une malice exagérée et un talent fou lorsqu’il s’agissait de mettre le cœur d’un homme sens dessus dessous. C’était un jeu risqué qu’entreprenait Maithias en sachant pertinemment que le spécimen qu’il avait devant lui et qui était par la même occasion son amante avait tous les atouts en main, et qu’elle savait parfaitement en jouer. D’un autre côté, la partie serait plus intéressante avec un tel « adversaire ». La soirée s’annonçait plutôt animée ! Puisque Mait’ comptait rester toute la nuit, et pourquoi pas même la journée d’après, le temps importait peu. Ils auraient tout loisir à défier leurs atouts de séduction.

Un bruyant soupir échappa des lèvres à Siobhan lorsqu’il l’embrassa du mieux qu’il put pour la faire flancher. Elle s’accrocha à lui du mieux qu’elle put, crispant ses doigts sur sa nuque. Il sourit intérieurement ; flancherait-elle déjà ? Il osait espérer que non, c’aurait été trop aisé. Elle lui décocha un sourire charmeur accompagné d’un regard ardent et s’écarta légèrement de lui, comme pour retrouver un second souffle, s’échapper d’un désir exubérant. Il détourna son regard quelques secondes, trop ensorcelé par le sien pour y résister longtemps. Qu’avait-elle en tête ? Il attendit qu’elle lui fasse part de ses projets en lui souriant …

« Je crois qu'il est temps de passer à quelque chose de plus... hum, alcoolisé, non ? »

Pourquoi pas… Elle le délaissa à nouveau pour sa cuisine, à croire qu’elle préférait les meubles aux hommes. Il ravala vite ce sentiment lorsqu’il entendit le bruit caractéristique d’une bouteille de champagne. Du champagne… Ce mot avait presque disparu de son vocabulaire depuis le temps. Il sourit, alors qu’elle revenait avec un plateau contenant deux flûtes remplies et des petits fours. Son amante semblait lui avoir préparé tout un festin, touchant à nouveau son orgueil sans le savoir. Entre temps, Mait’ était revenu se poser sur le canapé, prenant ses aises. Il plongea son regard dans son décolleté lorsqu’elle se baissa pour poser le plateau et s’excita. Il tenta intérieurement de se calmer, sans trop de succès cependant. Elle s’assit contre lui, collant sa jambe nue à la sienne. Même à travers le tissu du jean, il pouvait ressentir sa peau contra la sienne, et il en frémissait d’avance. Elle prit une des flûtes sur le plateau et la leva à hauteur de ses yeux, le forçant à la regarder. Quelle manipulatrice que cette Si’…

« A nous ? »
« A nous. »

Il prit le deuxième verre et fit tout comme elle, choquant son verre contre le sien. Il lui fit un franc sourire, et but une gorgée avec elle, après avoir consciencieusement examiné le verre. Qui sait, elle aurait pu glisser n’importe quel philtre là dedans ! Il sourit et reposa son verre sur la table – le champagne est un alcool qui s’apprécie lentement. Il l’embrassa de ses lèvres sucrées posa ses mains et sur sa jambe et sur sa joue. Il l’aimait, bien sûr, mais il était hors de qu’elle gagne. Il fit un nouveau sourire, plus accrocheur, et prenant le verre qu’elle avait dans les mains, le posa a terre pour la pousser sur le canapé.
A nous deux, amour de ma vie …

Siobhan semblait désormais beaucoup plus à son aise. Ses peurs de lui céder étaient évanouies, et elle prenait goût à leur jeu de séduction sans limites. Si bien qu’elle osait le plus osé, qu’elle tentait le plus périlleux, et qu’elle abordait les sujets à même de l’irriter et de le déstabiliser. Une certaine frayeur prit possession de son cœur pendant quelques instants, mais il se chargea lui-même d’écarter le sujet de ses soucis, soit une délicate jambe qui appartenait à son amante, la divine Siobhan. Il sourit à nouveau, extériorisant certainement son bonheur intérieur. Étreignant son amie d’enfance et tenta de lui procurer de plus vifs plaisirs, il entendit son cœur cogner dans sa poitrine de manière excessive et s’inquiéta un peu de son état de santé. Oui, il avait prévu de la faire céder à son charme, mais fallait-il pour cela mettre sa santé en danger ? Il étira ses lèvres d’une moue hésitante. Après tout, Siobhan était désormais une grande fille, elle saurait lui dire quand elle n’en pouvait plus … Mais ne possédait-elle pas un certain amour-propre qui l’empêchait de s’avouer défaitiste, qui l’obligeait à abandonner la partie. Partagé entre une brillante victoire et une pause méritée, nul doute qu’il baissa sa garde. Les doigts de la blonde étaient crispés contre son dos… Elle avait enfouie sa tête dans son épaule, comme elle le faisait toujours. Maithias attendit…

« Tu me chatouilles... »

Sa voix n’était plus qu’un grave murmure… Il hésitait toujours à poursuivre. Relevant sa tête un instant, elle le vrilla de ce regard qui le hantait tant ; le brun vacilla, manquant de lui tomber dessus de tout son poids. Heureusement, il se retint grâce à son bras posé contre l’accoudoir du divan… Même ainsi, il n’avait pu quitter son regard, ensorcelé. Elle était si… gracieuse. La voir ainsi, un sourire charmeur aux lèvres et vêtue de sa plus belle robe… Maithias se fit la réflexion d’être un escroc. Un escroc de femmes. Il ne méritait rien, et ne croyait en rien, et pourtant, le ciel lui avait offert la plus sublime créature. On dit que la chance sourit aux audacieux … Il ne se souvenait pas avoir fait preuve d’une quelconque audace. Il l’avait même abandonnée… Il lui retourna son sourire. Non, et non. Il ne la perdrait plus. Il se le répétait intérieurement, se persuadant qu’il était capable de veiller sur elle, de rester contre elle de jours entiers, de lui parler et de l’écouter sans arrêt, de ne pas faire preuve d’égocentrisme… Y arriverait-il ? N’aurait-elle pas, un jour, assez de cet homme à la chevelure brune prénommé Maithias, cet homme qui ne voyait pas plus loin que son propre nombril, et, par-dessus tout, ne possédait pas un rond ? Il ne savait pas s’il pourrait un jour la satisfaire. Soudain apeuré par tous les défauts qu’il possédait, il la serra tendrement et l’embrassa simplement. Il en avait oublié le jeu.

« Si’ ? M’aimera-tu toujours, malgré moi et mes imperfections ? Quoi que je fasse … »

Il murmura à son oreille en soupirant. Il espérait …

Siobhan se doutait bien que Maithias s'inquiéterait de sentir son coeur battre ainsi dans sa poitrine, surtout après ce qu'elle venait de lui révéler sur son état de santé. Mais elle avait avalé ses médicaments, et les pilules lui assuraient que son coeur ne la lâcherait pas, certainement pas même. Après tout, elle avait déjà passé vingt-quatre ans en pleine forme, alors pourquoi pas vingt-cinq, vingt-six... trente ? Elle finit toutefois par oublier ces pensées quand les lèvres de Maithias attaquèrent son cou, faisant immédiatement monter son envie de quelques degrés. Elle se tortilla un instant sous le beau brun, avant de décréter, dans un souffle rauque, qu'il la chatouillait. En fait, il chatouillait surtout son désir... Plutôt que rester ainsi, à la merci de son amant, elle planta son regard bleu dans le sien, le déstabilisant tellement qu'il menaça de s'effondrer sur elle. Ses yeux possédaient donc un tel pouvoir de séduction ? Étonnant...

Et pourtant, elle vit très vite la mine de Maithias se faire plus soucieuse, plus inquiète. La jeune femme se redressa légèrement, sans prendre garde à la bretelle de son soutien-gorge – qui était toujours présent sous sa robe, même détaché – glissant sur son bras. Elle se retrouva soudain pressée contre le torse du brun, ses lèvres sur les siennes, incroyablement douces. Un simple baiser, comme s'il voulait se rassurer par ce contact. Mais qu'est-ce qui lui était passé par la tête ? L'institutrice caressa la joue de son amant avec douceur, le dévisageant d'un air curieux et quelque peu inquiet. Il avait totalement changé d'attitude, d'un seul coup. « Si’ ? M’aimera-tu toujours, malgré moi et mes imperfections ? Quoi que je fasse … » Mais quelle question ! Quelque peu surprise, la jeune femme le serra contre elle, appuyant la tête de son amant contre son épaule nue.

« Évidemment ! Je t'aime Maithias, et ce quoi qu'il arrive. Tu me connais, tu sais que je ne suis pas du genre à m'embarrasser de petits détails quand je suis amoureuse... Mais pourquoi tu me demandes ça ? »

Elle l'obligea à se redresser pour le fixer droit dans les yeux, les deux mains posées sur ses joues. Il l'inquiétait, soudainement. Et finalement, elle se décida à lui changer les idées, le faisant basculer sous elle pour pouvoir s'occuper correctement de lui. Il fallait qu'il oubliât tous ses problèmes, ils n'étaient plus que tous les deux, à l'écart du monde...

« Non, oublie ma question, tu m'en parleras si tu en as envie... Je vais plutôt m'occuper de toi tiens ! »

Et avec un magnifique sourire particulièrement coquin, Siobhan souleva lentement sa robe, jusqu'à la faire passer par-dessus sa tête. Son soutien gorge put ainsi trouver le chemin du sol à son tour, et les doigts de la demoiselle se faufilèrent sous le haut de son amant, indiscrets. Elle avait craqué, d'une façon certes sous-jacente, mais craqué quand même. Tant pis pour son ego, le bien-être de Maithias passait avant tout.

Dans ses yeux océan, une lueur de surprise prit place. Ceux de Maithias brillaient étrangement, comme si une once maladive éclairait d’un faible feu ses prunelles chocolat. Dans son tendre amour, elle posa ses mains sur la tête du brun et l’appuya contre son épaule. Lui la serra de toute ses forces dans ses bras puissants, jusqu’à même l’étouffer s’il n’avait été aussi prudent.

« Évidemment ! Je t'aime Maithias, et ce quoi qu'il arrive. Tu me connais, tu sais que je ne suis pas du genre à m'embarrasser de petits détails quand je suis amoureuse... Mais pourquoi tu me demandes ça ? »

Il soupira d’aise… Mais il ne la connaissait pas tant que ça. Tout ce qui l’avait intéressé, dans sa jeunesse, était d’explorer les moindres recoins de son corps, et de lui faire l’amour des nuits entières, prétextant avoir à lui enseigner la culture du sexe. La vérité était qu’il n’en avait jamais su plus qu’elle, où du moins, plus pratiqué qu’elle. Il lui avait menti dans son propre but, égoïste qu’il était. Parfois, il avait peur de jusqu’où son nombrilisme pouvait le pousser ; il s’imaginait les plus horribles scénarios, où il abandonnait ceux qu’il aimait à la mort pour sauver sa propre vie… Il tenta d’expulser ces pensées négatives de son esprit ; elle tentait de le rassurer après tout, et ne pas effacer ses craintes aurait été une insulte à son affection pour lui. Elle releva son visage et lui porta un doux regard qui réchauffa son cœur et nourrit son espoir. Soudain, elle le surprit, et le fit basculer sous elle.

« Non, oublie ma question, tu m'en parleras si tu en as envie... Je vais plutôt m'occuper de toi tiens ! »

S’occuper de lui ? … Ca sonnait tellement bien… Elle illustra rapidement ses propos, faisant renaître un sourire malicieux sur le visage de son amant ; d’elle-même, elle enleva sa robe noire qu’il avait tant appréciée, et la fit glisser à terre, ainsi que le soutien-gorge qu’il avait lui-même défait quelques minutes auparavant. Lorsqu’il sentit ses doigts froids se glisser sous son pull, il plongea son regard dans le sien, en sachant cette fois-ci que ce n’était plus une histoire de vaincre ou de perdre. Seulement un instant magique et passionné. Ce regard qu’il aimait tant à en oublier le reste de son corps… C’était dire. Il posa ses mains sur son bassin et l’attira contre lui, heureux …

L’un contre l’autre, partageant leur désir, ils n’avaient jamais été aussi unis. Le grand salon diffusait en écho leurs souffles épars ; et le monde ne se résumait plus qu’en cet endroit, en ces quelques mètres qui profilaient leur bonheur. L’instant aurait duré toute une journée qu’ils ne s’en seraient plaints. Mais c’était impossible. Bientôt, ils s’allongèrent l’un sur l’autre, enlacés. Si seulement la vie n’avait pu être que félicité, Maithias n’aurait connu toutes les peines du monde, et ne se serait pas évertué, chaque jour, à tuer des gens pour le moins innocent mais qui entravaient sa justice et son idéal…

Il ouvrit ses yeux sur la nuit, sur son amante encore endormie, et déposa ses lèvres sur son front. L’admirant autant qu’il put, il attendait désormais son réveil …

Ses doigts parcouraient la peau blanche de Siobhan lorsqu’elle ouvrit les yeux. Dehors, les premiers rayons venaient chatouiller le couple enlacé ; sûrement que le l’aube pointât ses gouttes d’eau fraîches, mettant fin au règne de l’astre lunaire. Allongée sur un homme comblé, le bout de femme qui venait d’être tiré du pays des rêves se redressait lentement, encore quelque peu endormie. Ses sourcils bruns, tirés vers le bas, attestait de sa condition ; son subconscient était à la recherche de repères, de souvenirs… Identifiant celui qu’elle dominait de peu, elle se blottit dans ses bras et amorça la conversation :

« Mmh... Bonjour mon cœur... »
« Bonjour petite Sirène … »

Maithias déposa ses lèvres sur les siennes pour l’accueillir dans le monde affable qu’était le leur. Siobhan se leva et enfila un bas en dentelle noire, puis prit son pull, à lui, couvrant sa poitrine. Il sourit légèrement voyant la pudeur dont elle faisant preuve ; il était plutôt amusé. Soit, elle faisant ce dont elle avait envie. De nouveau, elle fila dans sa cuisine, le délaissant quelques instants. Il se réfugia dans ses pensées, attendant qu’elle revienne à lui. Des images lui revinrent par flashs, des images d’eux, de leurs nuits. Lentement, un grand sourire s’étira sur ses lèvres. Maithias avait toujours été attiré par elle… Bien sûr, ses formes avaient-évoluées avec le temps, ce qui vous donnait un aperçu de l’immensité de sa fascination…

« Hum... Thé ou café, Mait' ? »

Sa voix lui parvint comme un murmure étouffé, trop absorbé par ce qu’il revivait intérieurement. Il n’eut aucune réaction. Il pensait qu’il devrait bientôt la quitter, qu’il aurait aimé rester ses deux jours entiers en sa compagnie, sans la perdre de vue une seule seconde… Seulement, son travail secret l’attendait. Vers midi, il se rendrait à la grotte rejoindre ses compatriotes de haine, si bien qu’il serait forcé de la laisser seule ici... C’est seulement quand elle s’assit à sur l’accoudoir en posant sa tête sur ses genoux nus et qu’elle lui parla qu’il réagit.

« A quoi tu penses mon coeur ? »
« Oh… Rien. »

Il leva sa tête vers le plafond pour capturer son regard et lui sourit. Il se leva doucement et la prit dans ses bras, la soulevant du divan dans lequel ils avaient passé toute la nuit. Soudain, son ventre émit un son plutôt sonore. Il jeta un regard inquiet à son estomac, et c’est alors qu’il se souvint… Il n’avait pas mangé depuis la veille au midi, et Siobhan non plus d’ailleurs. Il releva la tête et observa son amante. Qu’en disait-elle ? Quoiqu’il en soit, il la porta jusqu’à la cuisine avec lui, entrant pour la première fois dedans. Maithias aurait voulu rester toute la fin de semaine avec elle, mais il savait que c’était impossible…

Un nouveau jour se levait peu à peu sur An Góilín, tirant les dormeurs sensibles de leur lit. On était samedi, et c’est pourquoi la majeure partie de la population sommeillait encore. Pour ainsi dire, seuls les chants de quelques oiseaux attestaient d’une quelconque présence. Siobhan et Maithias, eux bels et bien debout à cette heure matinale, semblaient entamer cette journée comme ils avaient clos celle de la veille. Soulevant son amante avec douceur, il lui soutira un hoquet de surprise qui le fit sourire. Cependant, ce sourire s’accompagna d’un regard inquiet envers leurs ventres respectifs ; la faim les tenaillait. Habités par leur passion, ils en avaient délaissés leur besoin primaires, si bien qu’ils avaient totalement zappés le dîner qu’ils étaient censés consommer. Maithias exécuta quelques pas, sa princesse logée au creux de ses bras, et déposa cette dernière dans sa cuisine. A l’intérieur de la pièce, une bouilloire émettait un sifflement de plus en plus sonore, crescendo retentissant qui crissait à l’oreille. La maîtresse de maison s’extirpa prudemment du contact de Maithias et fila vers un placard pour en sortir deux tasses et du pain de mie. Sans se retourner, elle l’engagea à se servir de quoi satisfaire son estomac :

« Tiens, sers-toi, la confiture est dans le frigo, de même que le beurre... Euh, la marmelade dans le placard derrière toi, avec la pâte à tartiner. Si tu veux du café je peux t'en faire aussi. »

* A vos ordres, M’dame. *

Maithias sourit. Cette intonation respectueuse mais néanmoins impérative qu’avait employée la femme de son cœur lui rappelait celle de sa mère lorsqu’il était petit. Une larme perla au coin de son œil qu’il effaça rapidement de sa main. Le brun se dirigea donc vers le frigo, et sortit la confiture et le beurre dont elle lui avait parlé. Nul besoin de café, il se servirait un thé lui aussi. Un son étrangement guttural lui parvint, et il se retourna en sursaut : Siobhan, penchée au dessus de l’évier, regorgeait. L’habituel hoquet de dégout envahit Maithias, mais se retourner pour délaisser ce spectacle n’était pas sa propriété ; Siobhan avant tout. S’approchant lentement d’elle, il se pencha au dessus et s’enquit de sa santé. Il ouvrit l’eau pour nettoyer l’évier, et par la même occasion rafraîchir le visage de sa bien-aimée qui ne semblait vraiment pas être au meilleur de sa forme…

Dix minutes passèrent, et Siobhan se releva lentement, vacillante, rinçant sa bouche. Maithias lui tendit un torchon imbibé d’eau, qu’il avait déniché je ne sais où.

« Désolée... J'ai dû avaler un truc pas frais hier midi, je sais pas... Ou alors c'est à cause de mes médicaments, ça m'arrive parfois. »

Un air inquiet s’était peint sur le visage du beau brun au fur et à mesure qu’elle vomissait. Et il l’était toujours. Il la prit dans ses bras et caressa son visage ruisselant de sueur. La fenêtre, ouverte, invitait le vent irlandais à balayer les fortes odeurs. Qu’elle pouvait donc être l’origine de ces maux de ventres soudains ? Un ange passa … Maithias blêmit, son visage prenant un ton blanc, pâle comme un linge. Il serra plus fort Siobhan dans ses bras.

Pitié, oh pitié, faites que ce ne soit pas ça… je me repentis de toutes mes erreurs, de mon passé, et même de mon futur, mais pitié, non, pas ça …